Univers des cadres et action syndicale : pratiques et représentations


C'est un voyage au pays des Ingénieurs et des Cadres qu'a réalisé l'étude " Univers des cadres et action syndicale : pratiques et représentations ". De tout voyage résultent des images fortes, imprimées à jamais dans la mémoire et des impressions que le temps emportera en tout ou partie. un voyage au pays des Ingénieurs et des Cadres qu'a réalisé l'étude " Univers des cadres et action syndicale : pratiques et représentations ". De tout voyage résultent des images fortes, imprimées à jamais dans la mémoire et des impressions que le temps emportera en tout ou partie.

Fixer des impressions qui le méritent et tirer la leçon des images fortes pour l'action syndicale : tel est le parti à prendre. Il s'agit par là de revisiter le champ des revendications dans la double perspective tracée par le proverbe chinois qui rappelle que la vie se résume toujours à " d'abord continuer et ensuite commencer ".

Continuer et commencer pour considérer l'existant et faire advenir un futur meilleur : tel est l'enjeu qui sous-tend la méthode d'élaboration du texte adopté par le Bureau Exécutif de l'Union des Cadres et Ingénieurs Force Ouvrière.

En avant-propos, il s'avère utile de souligner que le présent document est une synthèse des résultats d'une étude plus volumineuse mais qui emporte elle-même ses limites. Elle ne prétend pas à l'universel. Considérons là comme telle, comme un outil de travail privilégié auquel on ne doit demander que ce qu'il sait. Aussi sera-t-il pris appui sur les informations délivrées par l'étude pour formuler des considérations sur le présent en vue de l'avenir.
 

Hubert BOUCHET

Secrétaire Général de

l'Union des Cadres et Ingénieurs Force Ouvrière


Les données du problème

La généralisation du salariat débutée entre 1950 et 1970, l'extension de la protection sociale et la croissance économique soutenue ont contribué à la réduction notable des disparités entre les différentes catégories sociales ( revenu, consommation, santé..). Ce processus historique a dès lors participé à une forme de normalisation de l'emploi, salarié et stable, devenant pour la population active, la référence.

Or il est indéniable que sous l'avancée actuelle des évolutions structurelles et conjoncturelles qui affectent notre économie depuis le début des années 70, les fondements de la société salariale soient ébranlés. L'augmentation considérable du nombre de chômeurs et le développement des formes atypiques et précaires d'emplois en sont les principaux stigmates(1) . Cependant l'ensemble de ces transformations structurelles de l'économie n'affectent pas de la même façon toutes les catégories d'actifs ; le chômage(2) frappe ainsi plus facilement les jeunes, les femmes et les catégories les moins diplômées. Mais la généralisation des emplois précaires ( notamment CDD, intérim )(3) qui apparaît jouer le rôle d'un levier de régulation face aux aléas des conjonctures économiques ( ajustement à court terme des effectifs ) fait peser sur l'ensemble des salariés, de manière croissante, l'incertitude du lendemain ; ce constat n'est bien sûr pas sans conséquence sur l'évolution du rapport au travail et par extension sur l'articulation entre la sphère de la vie professionnelle et la sphère de la vie privée dont les principales formes objectives peuvent se caractériser par un investissement au sein d'activités à visée politique, syndicale et /ou associative.

Les cadres et ingénieurs longtemps considérés comme l'élite de la société salariale, protégés des crises successives, semblent aujourd'hui ne plus être à l'abri de cette transformation du monde du travail ( précarité, chômage, ). Cette population représente aujourd'hui 12.3% de la population active. Elle est devenue au fil des années la catégorie de perception et d'application la plus visible des transformations rapides de l'économie. En 20 ans, la population cadre a vu ses effectifs croître de façon substantielle passant de 1962 à 1999 de 892 000 cadres à plus de 2 940 000 soit une progression de 229% en 37 ans, un peu moins de 38.5% en 10 ans. Si la progression des services s'y exprime pleinement, cette progression a été rendue possible par l'élévation du niveau de formation et le développement des nouvelles technologies.

(1)-Robert CASTEL.- Les métamorphoses de la question sociale, Ed Fayard, Paris 1994

(2)-Données sur l'évolution du chômage et de l'emploi en France in Annexe pp89-90

(3)-Données in Annexe p 91
 


Contexte socio-économique de l'étude

L'évolution du marché du travail et de l'emploi en France depuis 1985

Pour mémoire, pendant cette période, la population active occupée a progressé de 4.6% passant de 21.706 millions à 22.705 %, soit 2 points de moins que le taux de croissance de la population active sur la même période ( 6.52% ) dont la progression annuelle est assez régulière, de l'ordre de 0.6% par an(4) .

La population active occupée croît donc moins rapidement que la population active depuis le début des années 80. Il faut rapprocher ce constat à l'effet d'une régression du modèle dominant de l'emploi salarié à temps plein et à durée indéterminée. Le développement endémique du chômage, conjugué au développement des formes atypiques d'emploi ( stages, CDD, intérim, temps partiels subis, CES ), ont contribué à ce tassement des effectifs salariés en cet fin de 20ème siècle.

Le secteur privé connaît à lui seul une progression de 40% des effectifs soit un passage de 9.7 millions à 13.6 millions d'actifs(5).

De l'industrie au tertiaire

Cette tendance s'est nettement confirmée ces dernières années. La part du tertiaire est ainsi passée de 59% en 1985 à environ 70.8% en 1998 alors que celle de l'industrie a régressé de 25 à 18.8%, le BTP et l'agriculture restant aux alentours de 4.3% et de 6.1%(6)

La réduction des activités liées aux branches de l'industrie conjuguée à l'accroissement des activités de services ( informatiques, conseils, ..) participent de cet accroissement du secteur tertiaire dont aujourd'hui 2 personnes sur trois y occupent un emploi et dont 25% des salariés le sont en Ile de France (7):

Depuis 1945, c'est une véritable explosion ; l'emploi dans les services a plus que doublé en cinquante ans, soit un taux annuel moyen de 1.7% correspondant à plus de 180 000 emplois par an. Toutefois la difficulté à saisir ce tertiaire(8) rend difficile le comptage exact des emplois relevant de ce secteur. Cependant les services non marchands regroupent aussi les administrations publiques nationales, régionales et locales, les organismes de Sécurité Sociale, le secteur associatif et les services informatiques, soit près de 5 millions de salariés aujourd'hui. Mais l'essentiel tient à l'essor des services fournis aux entreprises et aux services de type traditionnel (restauration, hôtellerie, automobile, études, conseil..) .

(4)Cf. DARES, DP, INSEE Bilan économique et social de la France. Dossier préparatoire à la conférence nationale sur l'emploi, les salaires et le temps de travail, in Documentation Française, septembre 1996

(5)DARES, DP, INSEE, Op.cit.

(6)INSEE, Division Emploi, 1999

(7)Cf Tableau page 10 BRAIBANT Michel.- " Le tertiaire insaisissable " in Economie et Statistique, Insee, n°146, juillet - août, 1982

Aux mouvements de création et de suppression d'emplois s'accompagne un mouvement plus profond de réorganisation des types d'emplois et des qualifications qui leurs sont associées(9).

Les métiers en progression

Les évolutions sont contrastées. A une montée importante de métiers fortement qualifiés, essentiellement cadres et techniciens, correspond une baisse substantielle des emplois non qualifiés. Ce mouvement structurel participe d'une redistribution des cartes socio-professionnelles.

Si 48 familles professionnelles ( FAP ) représentant 57% de l'emploi total ont bénéficié de 3 275 000 créations de postes, soit une croissance des effectifs de 27%, ce sont 35 autres familles professionnelles durant la même période qui ont perdu 2 440 000 emplois soit -26%(10) .Parmi ces 48 FAP créatrices d'emplois, 14 concernent essentiellement les cadres dont la hausse sur la période 83/98 atteint un niveau de 955 000 cadres soit une progression de 34% par rapport au total de ces 14 FAP.

Cette évolution du marché a profité en grande partie aux cadres de la formation et du recrutement dont le taux de progression atteint les 230% ( la progression en volume n'est toutefois pas la plus importante ), aux cadres administratifs , comptables et financiers ( +165 000 en niveau pour un taux de progression de 81% ), et enfin aux informaticiens ( + 117 000 en niveau soit une évolution de 63% sur 83/98 ).

Déclin des ouvriers et expansion du " groupe cadres " .

En l'espace de 20 ans, c'est la population cadre qui a vu ses effectifs croître de façon substantielle et ce précisément dans le secteur tertiaire. Elle passe ainsi de 1966 à 1987 de 771 450 cadres à plus de 2 millions pour afficher un effectif actuel d'environ 3 millions soit en 10 ans une progression de près de 40%, un triplement en l'espace de 30 ans (2 328 778 en 1996)(11) .

Dans ces mêmes années , les fonctions tertiaires étaient sensiblement occupées par des employés, masculins de surcroît(12) et les cadres de 40 - 59 ans représentaient à peine 3% de ces effectifs du tertiaire. Aujourd'hui, ils sont six fois plus, soit 18%.

Les ingénieurs et cadres représentaient dans le début des années 60 un peu moins de 5% de la population active totale et plus d'un actif sur cinq appartenait au monde agricole. Aujourd'hui cette catégorie comprenant les cadres et professions intellectuelles supérieures représentent 12.3% de la population active.

C'est donc une augmentation importante qui vient modifier le champ des catégories socio-professionnelles en France. Cette progression a nettement profité aux cadres professeurs, professions scientifiques ( + 57.5% ) et aux ingénieurs et cadres techniques d'entreprise ( + 46.2% ) ; Les cadres de la fonction publique n'enregistrant qu'une progression aux alentours de +20%.

(9)DUMARTIN Sylvie, TOMASINI Magda .- Déclin de l'emploi industriel et tertiarisation accrue, in Economie et statistique n°261, INSEE, 1993

(10)Source : Quinze ans de métiers, l'évolution des emplois de 1983 à 1998 ; DARES, n°18.1, 1999

(11)INSEE Enquête Emploi, 1995

(12)THELOT Claude .- Tel père, tel fils ? Origine familiale et position sociale, ed. Dunod, paris, 1982

Les objectifs de l' " Enquête cadres "

L'étude a pour but de recueillir des données, des informations concernant l'univers de travail des cadres et leurs rapports avec l'activité syndicale. Trois points sont apparus dès lors essentiels à éclaircir :

- Le profil sociologique en général des cadres ayant bien voulu participer à l'enquête ( âge, sexe, diplôme, profession, secteur d'activités,..).

- Leurs rapports sociaux au monde du travail ( conditions ,durée, stress, tension ).

- Leurs attentes et réflexions en matière de représentation syndicale des cadres.

C'est en conservant en mémoire ces objectifs principaux que le questionnaire a été élaboré.

La méthode : enquête par questionnaire

Avant de présenter les premiers résultats qui ressortent de l'enquête, il est indispensable de rappeler sommairement les conditions de réalisation de cette étude.

Considérant ici que les expériences concrètes et tangibles des salariés sont au fondement des connaissances du monde du travail, il est apparu opportun d'offrir par ce biais l'occasion de mieux saisir la complexité de l'univers du travail des cadres.

A cet effet, l'envoi d'un questionnaire directif, propre à permettre tant le ciblage de la population sur le territoire que la collecte d'informations et l'analyse des caractéristiques sociologiques de cette population, a été retenu.

Le questionnaire ne s'est accompagné d'aucune consigne particulière, laissant aux répondants la possibilité de porter un jugement quant à la forme et au contenu du matériau utilisé. Le choix du questionnaire s'est imposé d'autant plus aisément qu'il apparaissait plus souple dans sa diffusion et dans sa traduction en résultats.

La lettre de l'UCI diffusée à plus de 35 000 exemplaires a fait l'objet à cet effet d'un n° spécial où les objectifs recherchés éclairés à la lumière des limites de la méthode ont permis une diffusion massive du questionnaire auprès des cadres syndiqués comme non syndiqués. Le questionnaire comporte 35 questions fermées et une ouverte. Il recouvre 3 thèmes généraux :

- Les cadres et le monde du travail ( représentation et définition du statut et du rôle du cadre, évolution de carrière, travail et valeur du travail. ).

- Durée, conditions de travail et rémunération ( durée hebdomadaire de travail, préférences en matière de réduction du temps de travail, conditions de travail, préoccupations..

- Les cadres et l'univers syndical ( nature des revendications, solidarité salariale, efficacité du message syndical.).

800 questionnaires, dûment remplis, ont été retournés à l'UCI-FO. Ce sont joints à ce millier, 200 questionnaires supplémentaires en provenance des différentes Fédérations portant ainsi le nombre de questionnaires à 1 000.
 

STRUCTURE DE LA POPULATION ETUDIEE

Sexe



 

Effectifs

 

%

 

Hommes

 

845

 

85,18

 

Femmes

 

147

 

14,82

 


Age



 

Effectifs

 

%total

 

21-30 ans

 

58

 

6.09

 

30 - 39 ans

 

131

 

13.76

 

40 - 49 ans

 

419

 

44.01

 

50 - 59 ans

 

318

 

33.40

 

60 et +

 

26

 

2.73

 


Secteur d'activité



 

Effectifs

 

% total

 

Secteur Privé

 

219

 

22

 

Secteur Public

 

779

 

78

 

Dont Entreprises Publiques

 

510

 

51

 

Fonction publique

 

269

 

27

 

Taille des entreprises



 

Effectifs

 

% Total

 

Moins de 50 salariés

 

857

 

9.9

 

De 50 à 500 salariés

 

152

 

17.29

 

Plus de 500 salariés

 

640

 

72.81

 


Niveau de formation



 

Effectifs

 

% total

 

Sans Diplôme

 

17

 

1.74

 

Secondaire

 

140

 

14.34

 

Baccalauréat

 

259

 

26.54

 

Bac +2

 

204

 

20.90

 

Bac+3, +4

 

149

 

15.27

 

Bac + 5 et +

 

207

 

21.21

 

Lieu de résidence



 

Effectifs

 

%

 

Paris / IDF

 

364

 

38.52

 

Province

 

581

 

61.48

 


IDENTITE ET CARRIERE PROFESSIONNELLES

La réduction du temps de travail contribue à renforcer le sentiment qu'au-delà de la mise en place de nouvelles formes d'organisation du travail, la spécificité des cadres est de moins en moins perceptible, les frontières de plus en plus floues. L'exigence d'autonomie, d'une plus grande expertise, d'initiative et de compétences relationnelles ne sont dès lors plus l'apanage des cadres , les frontières socioprofessionnelles plus souples et plus arbitraires avec d'autres catégories tels que les techniciens supérieurs et les professions intermédiaires reconfigurent la dimension identitaire de ces salariés.
 

75% des cadres estiment que les transformations socio-économiques actuelles participent d'une évolution voire d'une réelle transformation de leur statut. 78% des cadres non syndiqués interrogés partagent la même opinion

 

Dès lors ces processus en cours ne sont pas sans conséquence sur l'organisation interne de l'entreprise, et partant de là, sur le rôle, la fonction du cadre et sur les conditions d'exercice de sa mission. De la double compétence du cadre technique et relationnelle au passage de l'expert à l'animateur, le cadre se doit d'être " adaptable " et " interchangeable " pour répondre de façon permanente aux exigences de nouveaux équilibres des entreprises.
 

32% des cadres de notre enquête ont changé deux fois au moins d'entreprise : 43% dans le privé, 32.5% dans les Entreprises Publiques et 20% dans la Fonction Publique. Si un cadre sur deux déclare avoir connu un "développement de carrière normal " 32% ont vécu des parcours professionnels " moins bien maîtrisés " ponctués par des périodes de chômage et / ou d'absence de promotion interne.

 

Selon l'âge, la protection somme toute relative des cadres face aux aléas d'une carrière " mal maîtrisée " est inégalement distribuée. 36% des 40-49ans et 33 % des plus de 50 ans contre 23.7% pour les cadres au dessous de 40 ans estiment avoir rencontré des difficultés. Si les jeunes cadres semblent plus protégés que leurs aînés ils rencontrent toutefois, une fois sur deux, des difficultés à gérer leur début de carrière.

Dès lors, dans un contexte où la visibilité à long terme n'est plus de mise, la mobilité s'impose comme un passage obligé dans un plan de carrière
 

Cadres et opinion quant à l'avenir de leur statut

Source : Enquête Cadres UCI-FO, 1999

Question : Pensez-vous que l'évolution de votre statut signifie :
 



 

Effectifs

 

%

 

%Non Syndiqués

 

La " dissolution "

du statut cadre

 

81

 

8.27

 

8.7

 

Le maintien du statut cadre

 

160

 

16.34

 

13.6

 

La transformation

 

738

 

75.38

 

77.7

 

Total

 

979

 

100.00

 

100.0

 

NR

 

21

 



 


 

Ensemble

 

1000

 



 


 

L'entreprise ou administration dans laquelle vous travaillez est votre (%) :

Source : enquête cadres UCI-FO, 1999

Question : L'entreprise ou administration dans laquelle vous travaillez est votre :
 



 

Troisième

 

Entreprises Publiques

 

Fonction publique

 

Ensemble

 

Première

 

34.8

 

44.6

 

60

 

46

 

Seconde

 

22.5

 

30

 

19.5

 

22

 

Troisième

 

43

 

32.5

 

20

 

32

 


Les conditions d'évolution de la carrière des cadres

Source : Enquête Cadres UCI-FO

Question : Dans votre carrière avez-vous connu :
 



 

Effectifs

 

% Total

 

% Non Syndiqué

 

une évolution rapide

 

93

 

9.37

 

11.9

 

Une évolution normale

 

557

 

56.09

 

54.8

 

des interruptions dues au chômage

 

14

 

1.41

 

2.4

 

des interruptions dues à la maternité

 

9

 

0.91

 

0.5

 

des interruptions dues à l'éducation des enfants

 

12

 

1.21

 

0.5

 

une stagnation

 

136

 

13.70

 

12.9

 

une régression

 

36

 

3.63

 

2.9

 

une carrière en "stop and go"

 

136

 

13.70

 

14.3

 

Total

 

933

 

100

 

100

 

NR

 

7

 



 


 

Ensemble

 

1000

 



 


 

LES FEMMES CADRES

Les femmes représentent 44.3% de la population active occupée en France en 1998 dont 33% sont des cadres. La féminisation des emplois, y compris dans l'encadrement, s'est accrue depuis maintenant 30 ans et ne semble pas avoir atteint son apogée. Elle est plus sensible dans la Fonction Publique que dans le privé.

Elles occupent aujourd'hui une place incontestable dans le monde du travail y compris dans l'encadrement ( 30% ) mais parallèlement à un recrutement massif depuis quelques années (dans le secteur privé, le taux de féminisation est de 28% (Source AGIRC, 1998 Base Cotisants de 2 460 785 cadres( art 4 et 4 bis au 31 décembre 1997 )soit environ 3 fois plus qu'en 1966 ), de fortes inégalités soit à l'embauche et ce, à diplôme égal, soit au niveau du salaire et ce, à fonction égale persistent.

Si l'on associe les interruptions dues au chômage, le déclassement, la stagnation de carrière, l'évolution discontinue, à une gestion de carrière " non maîtrisée " cela concerne seulement 21% des cadres féminins alors qu'elle concerne 32% des cadres masculins. Toutefois si les femmes cadres déclarent connaître plus souvent une évolution " normale " de carrière que leurs homologues masculins celle-ci est moins souvent une évolution " rapide ".

Les cadres féminins plus diplômés se heurtent encore aux inégalités

Certes l'accès à l'éducation, à l'enseignement supérieur et à la formation continue a permis tout en contribuant au progrès social, la réduction des inégalités professionnelles mais le chemin est encore long et les résistances encore trop nombreuses. Les femmes cadres se heurtent trop souvent " au plafond de verre " et ne parviennent pas toujours à mener à bien leur carrière. Plus nombreuses dans les niveaux supérieurs de formation, elles sont en effet 44% à avoir au moins une Licence contre 35% pour les hommes qui sont en outre 43.2% à posséder au plus un Baccalauréat contre 39.6% pour les femmes. De plus 15.2% des hommes ont un CAP, Brevet ou certificat d'études contre seulement 9% pour les femmes. On note aussi que la Licence et la maîtrise sont des diplômes fortement corrélés à la variable " femme ". Si les femmes sont plus nombreuses que les hommes à posséder un diplôme d'études supérieures de niveau Bac +3, elles restent sous-représentées dans la majorité des filières dites d' " élite " ( grandes écoles, ingénieurs ). A âge égal, et même pour les catégories les plus jeunes, leur place reste moindre que ce que leur niveau de formation laisserait attendre, tant sur le plan quantitatif, que sur le plan qualitatif du niveau des fonctions occupées et des salaires : les inégalités restent fortes à diplômes et date d'obtention égaux. Plus fortement représentées dans les professions scientifiques ( 51.1% ) et dans la Fonction publique ( 30% ), elles sont en forte progression dans le secteur privé. Si la proportion de femmes cadres administratifs et commerciaux d'entreprises ( 33% ) est supérieure au taux moyen de féminisation de l'encadrement, elles sont sous représentées parmi les ingénieurs : 12.4% contre 3% en 1960. Enfin si le taux de féminisation des jeunes cadres est nettement supérieur à celui des cadres plus âgés, il reste à préciser que les femmes cadres sont moins souvent des hiérarchiques ( intermédiaires et supérieurs confondus ) que leurs collègues masculins, mais leur handicap pour accéder à la hiérarchie, communément mis en avant, est moins prononcé qu'on ne le pense. Toutefois les postes à responsabilité, même s'ils restent moins bien rétribués que pour les hommes, demeurent attractifs. Elles sont moins bien payées en moyenne que leurs homologues masculins puisque leur salaire médian s'élève à 9 502 F et celui des hommes à 12 160 F. Le taux de féminisation de la population progressera encore, sans doute, au cours des vingt-cinq prochaines années, au fur et à mesure que les cohortes anciennes fortement masculines, partiront à la retraite et seront remplacées par de nouvelles, beaucoup plus féminisées. Il est à prévoir qu'alors, le taux général sera de l'ordre de celui rencontré chez les cadres de moins de 30 ans soit 37%. Afin que leur gestion de carrière ne soit pas ralentie et /ou entravée par les pressions exercées par les stratégies des directions d'entreprises et que leurs différents investissements au sein de leur entreprises comme au sein de leur foyer familial soient pleinement reconnus, elles sont favorables à une réflexion sur l'organisation du travail susceptible de favoriser l'égalité et le partage des responsabilités professionnelles et familiales et qui puisse ouvrir des possibilités de carrières tout en permettant aux hommes de s'investir dans la vie familiale. L'égalité des carrières et l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée sont une des condition de l'épanouissement de toutes et de tous.

CONDITION DE TRAVAIL

Si le développement de carrière est jugé positif, voire normal, pour plus d'un cadre sur deux, cette " normalité " ne s'accompagne pas pour autant d'un sentiment de valorisation de soi par le travail.

38.5% des cadres interrogés estiment que leur travail est de moins en moins intéressant voire pour 26.1% d'entre eux sans changement réel.

La gestion à court terme ( zéro défaut, zéro stock.) des entreprises et des administrations, se traduit bien souvent sous la forme d'une pression générale sur les salariés et sur leur propre travail.

63.8% des cadres interrogés estiment que pendant la dernière période leurs conditions de travail se sont détériorées. Plus d'un cadre non syndiqué sur deux partage ce jugement (57.1% ).

Il existe un renforcement de l'obligation du culte de la performance dont les implications sur la santé mentale ne sont pas négligeables. Les tensions au travail vécues par les salariés n'épargnent alors pas les cadres et les ingénieurs.

Dans ce contexte, la tension réclamée par leur travail ne fait que s'accroître et 82% des cadres interrogés le déclarent explicitement quel que soit le niveau de formation.

C'est toutefois dans les entreprises de moins de 50 salariés que les cadres et ingénieurs sont en moyenne les plus nombreux à juger de l'accroissement d'une tension liée à leurs activités professionnelles : 87.5% Les conséquences des restructurations sur les conditions de travail ne sont pas indifférentes aux côtés des questionnements suscités par le projet de loi sur les 35 heures de l'accroissement de la proportion de cadres à trouver leur charge de travail excessive. Les cadres ont pour ainsi dire " découvert " qu'ils travaillaient dans un cadre réglementé, à l'instar des autres salariés, les conduisant à réévaluer leur part de travail au sens strict. Le rapport social des cadres au travail s'est en effet modifié. A une socialisation au travail axée autour d'une structure tournée vers le produit et des tâches clairement définies, succèdent à travers un recentrage de l'entreprise autour du management par la qualité conjointement associée à une politique d'approche client, les exigences de la clientèle et celles plus manifestes des actionnaires soucieux de leurs investissements. Les modèles de management d'entreprise contribuent dès lors à placer les cadres dans une situation impossible à gérer : l'excellence ou l'exclusion. Ce malaise participe au creusement d'un fossé entre le système de valeurs de l'entreprise et l'évolution socio-culturelle des salariés. Cette distance se manifeste cependant moins à l'égard du travail qui reste une valeur identitaire forte mais bien plus à l'égard de l'entreprise et de son modèle dicté.
 

Travail et valorisation de soi

Source : Enquête Cadres UCI-FO

Question : Votre travail est-il :

 



 

Effectifs

 

% Total

 

% Non syndiqué

 

De + en + intéressant

 

346

 

35.4

 

42.4

 

De - en - intéressant

 

377

 

38.5

 

28.6

 

Sans changement

 

256

 

26.1

 

29

 

Total

 

979

 

100

 



 

NR

 

21

 



 


 

Ensemble

 

1000

 



 


 

Conditions de travail des cadres

Source : Enquête Cadres UCI-FO

Question : Que pensez vous de vos conditions de travail ?
 



 

Effectifs

 

% Total

 

% Non syndiqué

 

Elles se sont améliorées

 

109

 

11

 

11.3

 

Elles se sont détériorées

 

633

 

63.8

 

57.1

 

Elles n'ont pas changé

 

250

 

25.2

 

31.6

 

Total

 

992

 

100

 

100

 

NR

 

8

 



 


 

Ensemble

 

1000

 



 


 

Tension au travail

Source : Enquête Cadres UCI-FO

Question : La tension que réclame votre travail s'est :
 



 

Effectifs

 

%Total

 

% Non syndiqué

 

Accrue

 

815

 

82

 

74.5

 

Atténuée

 

36

 

3.6

 

2.9

 

Sans changement

 

143

 

14.4

 

22.6

 

NR

 

6

 

100

 

100

 

Total

 

994

 



 


 

Ensemble

 

1000

 



 


 

DU TEMPS TRAVAIL A SA REDUCTION

Le temps de travail des cadres s'inscrit dans un double processus historique: une durée de travail qui demeure largement supérieure à celle des autres catégories et ce quelle que soit la nature du contrat de travail, et une évolution vers le haut de cette durée au cours des 15 dernières années. La relation particulière des cadres avec le temps de travail se confirme ainsi au niveau des résultats de notre enquête.

36% des cadres interrogés effectuent plus de 46 heures par semaine et environ 18% une durée de travail égale à 39 heures.

Mais les durées hebdomadaires ainsi déclarées ne peuvent faire l'économie des différenciations observables au sein même de la catégorie. L'étude confirme ainsi la variable " secteur d'activité " :

Le secteur privé suivi par les entreprises publiques reste le secteur où la durée hebdomadaire de travail est la plus élevée; respectivement 39,40% et 38,30% des cadres déclarent une durée supérieure à 46 heures contre 29,2% pour la Fonction Publique.

Les cadres tendent donc à contester de plus en plus leur charge de travail excessive et semblent dans le même temps ouverts à la réduction du temps de travail. Il est certains que les cadres et ingénieurs travailleraient moins qu'aujourd'hui si la réduction de leur activité n'était pas associée dans leur univers à une forme de désengagement professionnel compromettant leur carrière. L'enjeu de la réduction du temps de travail réside donc dans leur capacité à respecter davantage un horaire journalier qui demeure théorique et dont l'élasticité par rapport à la charge de travail les conduit fréquemment à prolonger leur présence dans l'entreprise. On peut y voir une modification dans la hiérarchie des valeurs de cette catégorie où la réussite de la vie privée importe plus que la performance professionnelle et celle de leur firme même si demeure néanmoins, la dite performance.

58.42% des cadres interrogés préfèrent une réduction de la durée hebdomadaire sous la forme de journées ou demi-journées avec pour objectif un passage à la semaine de 4 jours.

Le choix d'une réorganisation du temps de travail axée autour de l'accroissement du temps libéré sous forme de congés supplémentaires est alors partagé par l'ensemble des répondants quels que soient leur âge, leur sexe et leur secteur d'activité. Aucun écart significatif ne vient opposer le privé au public : respectivement 58% et 58.75% des cadres interrogés estiment devoir réduire leur durée de travail hebdomadaire sous la forme d'attribution de journées supplémentaires de repos.
 

Répartition et poids des effectifs cadres selon la durée effective de travail hebdomadaire



 

% Privé

 

%Fonction Publique

 

% Entreprises publiques

 

Effectifs

 

% Total

 

39 h

 

13.10

 

25.70

 

16.10

 

174

 

17.80

 

40 - 45 h

 

47.50

 

45.00

 

45.50

 

449

 

45.9

 

46 - 55 h

 

33.10

 

25.70

 

34.30

 

313

 

31.90

 

> 55 h

 

6.30

 

3.50

 

4.00

 

44

 

4.40

 

Effectifs

 

232

 

247

 

501

 

980

 

100

 

% total

 

23.67

 

25.20

 

51.12

 



 


 
 

 



 

Effectifs

 

% Total

 

% Non syndiqué

 

Réduction journalière de la durée de travail

 

57

 

5.8

 

3.8

 

Journées supplémentaires de repos regroupées

 

576

 

58.4

 

64.8

 

Réduction de la durée hebdomadaire

 

331

 

33.6

 

29

 

Autres

 

22

 

2.2

 

2.4

 

NR

 

14

 

100

 

100

 

Total

 

986

 



 


 

Ensemble

 

1000

 



 


 


Source : Enquête Cadres UCI-FO 1999

Question : Quelles sont vos préférences en matière de réduction du temps de travail ?



PREOCCUPATIONS DES CADRES

Bien souvent considérés comme une catégorie privilégiée, les cadres se heurtent aux mêmes difficultés que d'autres lorsqu'il s'agit de concilier la vie familiale et la vie professionnelle, même si les priorités diffèrent quelque peu.

L'entreprise comme unique préoccupation ne s'impose plus comme l'invariant identitaire du cadre.

L'analyse des réponses recueillies sur les attentes et préoccupations des cadres aboutit ainsi à un verdict sans appel: aux yeux des salariés, l'entreprise gagne du terrain sur toutes les dimensions qui relèvent de la performance économique ( productivité, rentabilité, qualité des produits, des services, capacités d'innovation ... ) mais elle régresse en revanche sur tous les critères renvoyant à la gestion des hommes ( organisation interne, communication, formation et surtout dialogue social.). Ce découplage entre l'économique et le social se traduit par ce constat de ne plus voir leur progression personnelle et leur carrière professionnelle assurées par leur entreprise.

Notre étude confirme tant ce découplage de l'économique et du social que la priorité donnée à la vie privée :

" L'avenir des enfants " s'impose comme l'une des principales préoccupations des cadres ( 24.3% ) et les hommes sont d'avantages inquiets ( 25.6 % ) que les femmes ( 16 % ) suivi de près par " la dégradation de l'ambiance au travail " - harcèlement, conflits, tensions...- (20.3% ).

L'avenir de l'entreprise, comme celui de la carrière, constitue avec l'inquiétude du chômage, le second volet des préoccupations professionnelles majeures des cadres. La crainte du chômage est cependant d'autant plus prégnante qu'elle concerne les cadres du secteur privé. 15% pour le privé contre 10% pour les cadres d'entreprises publiques et 8% dans la Fonction Publique. La hiérarchie des valeurs se modifie sous l'effet d'un glissement de la nature même de ces préoccupations, qui vont du pôle " centré vers l'entreprise " vers un pôle " centré vers l'univers du hors travail ". Les interrogations se portent sur l'avenir et notamment celui des enfants car aujourd'hui pour les cadres la préoccupation première avant la rémunération et le chômage, c'est le souci du devenir de leur progéniture. Le statut cadre n'est plus un capital social et économique que l'on transmet aussi facilement de génération en génération. Ce constat d'un mal être qui exprime subjectivement la manière dont les individus se perçoivent concerne alors l'ensemble des catégories professionnelles. Elles expriment une évolution dans l'approche d'une conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale.

 



CADRES ET ACTION SYNDICALE

Le déséquilibre croissant du rapport contribution / rétribution accroît dès lors ce sentiment naissant et partagé, celui de sacrifier une partie importante de sa vie professionnelle pour une entreprise dont on n'est plus certain qu'elle vous sera reconnaissante. Face à la perplexité des cadres partagés entre l'inacceptation de conditions de travail et la nécessité de les modifier, la démarche syndicale n'apparaît pas incompatible avec le statut; elle apparaît même plausible sinon essentielle.

83.7% des cadres affirmant n'appartenir à aucune organisation syndicale déclarent devoir être syndiqués au même titre que les autres salariés.. La solidarité salariale joue pour plus d'un cadre sur deux ( 53.5% ) qui juge leurs revendications " proches " de celles des autres salariés.

La proximité salariale observée ne s'oppose nullement à la mise en ouvre de structures spécifiques de représentation des cadres :75% des cadres non syndiqués du secteur privé estiment cette démarche indispensable. On observe en outre que les formes traditionnelles de communication syndicale, à savoir la réunion syndicale proprement dite et le tract " généraliste " n'apparaissent que peu convaincants pour les cadres (11.9%) notamment les jeunes - 8% en moyenne des moins de 30 ans et des 30 - 40 ans en font écho. A l'opposé, la réalisation d'un tract " spécifique " adressé aux cadres semble être plus appréciés pour l'ensemble des classes d'âge ( 15% ) à l'exception des plus anciens ( 6% seulement des 60 ans et plus ).Même observation pour l'intérêt porté à la réalisation d'une " lettre personnelle " adressée à domicile qui regroupe 28.3% des cadres de moins de 30 ans contre 11.8% des plus de 60 ans. Le "journal syndical" à domicile apparaît comme un support de communication approprié essentiellement par les classes d'âge intermédiaire alors qu'il est nettement désavoué par les moins de 30 ans ( 4.3% ) et les plus de 60 ans ( 5.9%' Enfin concernant le choix d'Internet, ce support ne semble pas encore faire l'objet de toutes les espérances en matière de communication syndicale ( 3% à peine des choix retenus ). Les moins de 30 ans sont ainsi 6.5% à faire ce choix, soit plus du double de la moyenne générale. La spécificité et la personnalisation des moyens de communication, auxquelles vient se greffer la demande d'une plus grande proximité des échanges traduisent un réel besoin d'expression, une volonté de se faire entendre au-delà des espaces rigidifiés par des structures hiérarchiques d'entreprises, où la communication interne est vécue comme un élément d' " instrumentalisation " et de dépossession de soi. Le canal syndical sous une forme plus proche d'un outil de parole - forum, colloque, table ronde - n'est alors nullement désavoué et peut répondre aux aspirations des cadres en matière de revendication.

 

Les cadres et les supports de communication syndicale

Source : Enquête Cadres, UCI-FO, 1999

Question : Quel est le canal de transmission le plus efficace pour un message syndical destiné aux cadres ?

 



 

Effectifs

 

%

 

% Non syndiqué

 

Le contact individuel

 

268

 

27.5

 

21.9

 

La réunion syndicale

 

116

 

11.9

 

8.5

 

Le tract général

 

76

 

7.8

 

10.9

 

Le tract spécifique

 

145

 

14.9

 

21.9

 

Le journal adressé à domicile

 

134

 

13.7

 

11.9

 

La lettre personnelle

 

208

 

21.3

 

20.9

 

Internet

 

28

 

2.9

 

4

 

Autres

 

1

 

0.1

 

0

 

Total

 

976

 

100.0

 

100.0

 

NR

 

24

 



 


 

Ensemble

 

1000

 



 


 


CADRES ET COMMUNICATION SYNDICALE

Si la spécificité de la population cadre en regard de sa position dans l'univers du travail ne semble pas faire obstacle à l'adhésion d'un mouvement revendicatif, les formes de celui- ci, les supports de communication attendus, la sémantique usitée sont autant de paramètres que les cadres entendent bien voir s'adapter aux contingences de leur position. La force de l'aspiration salariale, l'espoir d'une meilleure ambiance de travail et la revendication d'une plus grande autonomie dans l'organisation de leur travail caractérisent la position du cadre. Or si l'attente de ces salariés à l'égard du syndicat reste très forte, elle semble ne pas être satisfaite. Sans doute est-elle incomprise ou bien encore entachée de préjugés bien souvent fondés sur la perplexité d'une catégorie en mal de positionnement entre l'acceptation de leur condition de travail - élément identitaire de pouvoir - et la nécessité de la modifier. Mais aujourd'hui c'est toute cette ambiguïté historique dont l'écart entre la symbolique d'un statut et la réalité de ses attributs ne cessant de se creuser qui participe aux modifications perceptibles de ces salariés.

La question ouverte " Quelles sont vos attentes prioritaires envers le syndicat ? " a été l'occasion pour les répondants de formaliser leurs critiques et leurs propositions. Sous forme de courtes phrases, voire de quelques mots, les informations recueillies sont apparues comme le reflet de propositions en vue de pouvoir prétendre à la mise en place de véritables stratégies de communication, de dialogue et d'intervention plus adaptées à la spécificité d'une position. Des mots et notions figurent très souvent dans les messages et traduisent un véritable besoin de communiquer une ou des idées particulières sur les modalités d'une action syndicale en direction des cadres.

Parmi l'ensemble de ces messages, des notions comme " défense " " information ", " aide ", " ouvert vs ouverture " caractérisent au mieux les domaines d'interventions et les qualités attendues d'un syndicat, marquant du même coup, l'attachement à des valeurs morales et d'efficacité d'une organisation, qui se doit d'être " indépendante ", " compétente ", " solidaire " et " disponible ".

Les mots utilisés pour parler des attentes à l'égard du syndicat forment alors deux champs lexicaux, Celui formé autour de la notion de " défense " renvoyant soit aux intérêts des salariés en général ou des cadres en particulier soit aux conditions et à l'aménagement du travail -, celui formé autour de la " communication " qu'elle soit sous la forme d'une" information ", d'" une écoute " en tant que telle, d'un " soutien " ou d'une" disposition " permanente au " dialogue ".

Outre la nécessité d'une présence sociale forte - " présence ", " proximité " - les cadres attendent de leur syndicat qu'il sache leur donner une orientation et des moyens nécessaires pour agir efficacement: " aide ", " services ", " conseils ". Notons au passage que les notions de " réalisme ", de " compétence " et " de réactivité " sont à ce sujet très souvent reprises, dans un souhait de " clarté " et d' " indépendance " à l'égard du politique mais aussi dans un souci d' " efficacité " et de " cohérence " de l'action syndicale.

 

 

Mots les plus fréquemment employés dans les messages des cadres adressés au syndicat

Source : Enquête Cadres, UCI-FO, 1999

Exemple : Le terme " défense " a été employé 250 fois dans l'ensemble des réponses à la question Quelles sont vos attentes prioritaires de la part du syndicat ?

 

Défense : 250

 

Présence ( terrain ) : 19

 

Apolitisme :11

 

Information : 207

 

Dialogue : 19

 

Intégrité : 10

 

Ecoute : 100

 

Négociation : 19

 

Réactif : 9

 

Soutien : 50

 

Revendication : 19

 

Proximité :9

 

Action : 45

 

Inter-syndicalité : 17

 

Lutte : 7

 

Représentation : 38

 

Efficacité : 16

 

Ouverture : 7

 

Indépendance : 35

 

Compétence : 16

 

Aide :7

 

Conseils : 28

 

Partenaire social :14

 

Consultation :6

 

Disponibilité : 24

 

Solidarité : 12

 

Consultation :6

 

Réalisme : 23

 

Cohérence : 12

 

Protection :6

 

Verbes les plus fréquemment employés dans les messages des cadres adressés au syndicat

Source : Enquête Cadres, UCI-FO, 1999

Exemple : Le verbe " défendre " a été employé 116 fois dans l'ensemble des réponses à la question Quelles sont vos attentes prioritaires de la part du syndicat ?
 

Défendre : 116

 

Prendre en compte :12

 

Etre à l'écoute : 40

 

Proposer :12

 

Informer : 25

 

Négocier :11

 

Agir :13

 

Proposer :5

 

Conclusion

Il n'est bien évidemment pas possible de résumer de manière exhaustive l'ensemble des attentes des cadres tant leur situation sociale et professionnelle est diverse. Pourtant, à côté des exigences du monde du travail, les cadres ont eux aussi leurs propres aspirations et leurs propres craintes.

En fait toute la difficulté réside dans l'ambivalence de la position du cadre où l'ensemble des questions relatives au travail et à la réduction de celui-ci s'accompagne aussi bien de la volonté d'articuler vie privée et vie professionnelle que de participer malgré lui à une présence permanente, continue sur son lieu de travail pour conserver ce lien étroit avec l'entreprise et ne pas pénaliser un parcours professionnel.

A l'image des autres salariés, les facteurs de contraintes pèsent donc sur le rythme de travail des cadres et la dégradation des moyens matériels, physiques et psychiques ont considérablement contribué à la détérioration du climat des groupes de travail. Ils sont donc de plus en plus inquiets et l'optimisme renouvelé d'un avenir économique ne suffit pas à réduire l'impact d'une opinion plus critique à l'égard du contexte social et du monde de l'entreprise.

On ne peut donc plus ignorer aujourd'hui que les préoccupations évoquées par les cadres ne sont dès lors plus saisies comme les difficultés personnelles de salariés individuels mais comme l'expression de difficultés sociales plus larges.

Au terme de l'étude, les cadres refusent d'aliéner leur vie au profit de l'entreprise et sont prêts à entreprendre une action collective sans pour autant adhérer aux différents mots d'ordre des acteurs institutionnels. Ils estiment dans le cadre de l'évolution de leur emploi qu'une volonté collective doit s'attacher à défendre les valeurs d'une société moderne tout en refusant une " société subordonnée aux critères financiers ".

Dans les coulisses de la durée du travail, ce sont donc des interrogations sur le rôle des cadres dans l'organisation, leurs conditions de travail et de vie personnelle, leur capacité à advenir qui transparaissent.
 

 

 

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Dernière modification : 28 août 2012