La clause de non concurrence se définit comme celle qui, après la
rupture de la relation de travail et sous certaines limitations, va
interdire au cadre d'exercer une activité préjudiciable aux intérêts de
l'entreprise. Elle est prévue par le contrat de travail ou par la
convention collective.
Pour être valable, la clause doit respecter 5 conditions
cumulatives : être indispensable à la protection des intérêts légitimes
de l'entreprise, être limitée dans le temps et dans l'espace, tenir
compte des spécificités de l'emploi du salarié, comporter l'obligation
pour l'employeur de verser une contrepartie financière au salarié.
Cette dernière condition résulte de 3 arrêts célèbres du
10/07/2002 de la chambre sociale de la Cour de cassation. Ainsi, à
défaut de contrepartie financière la clause de non concurrence est
nulle, peu importe d'ailleurs que la clause de non concurrence soit
antérieure à la jurisprudence de 2002.
Depuis cette date, plusieurs décisions de la Haute cour sont
venues préciser cette condition de validité des clauses de non
concurrence.
La chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du
24/01/2007 (pourvoi n°04-43.121) décide que la clause de non concurrence
insérée dans le contrat de travail peut être modifiée lors de la rupture
du contrat dans le cadre d'une transaction.
En l'espèce, le contrat de travail du salarié comportait une
clause de non concurrence assortie d'une contrepartie financière égale à
9 fois la moyenne brute mensuelle des 12 derniers mois.
Cette clause avait été modifiée dans l'accord transactionnel,
ainsi l'indemnité transactionnelle forfaitaire englobait la contrepartie
financière du salarié à la clause de non concurrence et la renonciation
de ce dernier à toute réclamation relative à l'exécution et à la rupture
du contrat de travail.
Le salarié conteste que la contrepartie financière ait été
incluse dans l'indemnité transactionnelle et demande la nullité de la
clause pour défaut de contrepartie financière.
Les juges du fond ont, dans leur appréciation souveraine, estimé
que la contrepartie était bien comprise dans l'indemnité
transactionnelle, alors qu'est souligné qu'une interprétation avait été
nécessaire en raison de l'ambiguïté des termes de la transaction.
La décision a été confirmée par la Haute cour qui en profite au
passage pour rappeler comme elle l'avait fait en 1995 (Cass. Soc
20/06/1995, n°91-45.261) qu'aucune disposition légale ou conventionnelle
n'interdit aux parties de modifier, dans le cadre d'une transaction,
certaines modalités de la clause de non concurrence prévue dans le
contrat de travail.
En 1995, la Cour de cassation avait admis une modification de la
clause dans le temps et dans l'espace, elle l'admet aujourd'hui pour la
contrepartie financière.
Pour nous, c'est l'occasion de souligner que la transaction a
autorité de la chose jugée, qu'elle produit les mêmes effets qu'un
jugement devenu irrévocable. La contestation devant le Conseil des
prud'hommes devient alors très limitée, aussi il est essentiel de bien
cadrer juridiquement la transaction.
De plus, dans un arrêt du 07/03/2007 (n°05-45.511), la Cour de
cassation apporte des précisions quant au montant de la contrepartie, et
quant à ses modalités de versement.
Elle interdit à l'employeur de prévoir une majoration de salaire
en guise de contrepartie financière à l'obligation de non concurrence.
La contrepartie ne peut désormais plus être versée avant la rupture du
contrat sous peine d'annulation de la clause.
En effet, certains contrats de travail ou conventions prévoyaient
le versement d'une avance sur la contrepartie pécuniaire en cours
d'exécution du contrat de travail. Ces avances figuraient le plus
souvent sur le bulletin de paie du salarié, seul moyen pour l'employeur
de s'en prévaloir.
La Haute cour ne permet plus cette modalité de versement et
justifie sa décision inédite en indiquant que la contrepartie financière
a pour objet d'indemniser le salarié qui après la rupture du contrat de
travail est tenu d'une obligation qui limite ses possibilités d'exercer
un autre emploi. Le salarié doit donc percevoir l'indemnisation au
moment où l'obligation de non concurrence imposée par la clause pèse sur
lui.
Cette décision est essentielle car une clause qui fixerait le
paiement de la contrepartie sous forme de majoration encourt
l'annulation. Ainsi, si salarié respecte une clause considérée comme
nulle, il subit un préjudice qui doit être réparé par l'octroi de
dommages et intérêts.
Encore, dans cet arrêt la Haute cour considère que le montant de
la contrepartie ne peut dépendre uniquement de la durée d'exécution du
contrat.
En l'espèce, le contrat de travail comportait une clause de non
concurrence d'une durée de deux ans pour une ancienneté supérieure à 5
ans (dans la profession) et la contrepartie était fixée à 7 % de son
salaire, incluse dans la partie fixe de sa rémunération et dans le taux
de ses commissions.
La solution inédite est d'autant plus logique que dans un cas où
le contrat de travail serait rompu peu de temps après l'embauche, le
salarié serait lésé sur le montant de la contrepartie perçue.
A la différence de la décision sur le moment où la contrepartie
doit être versée, ce cadrage n'est pas impératif, mais il participe à la
précision des conditions de validité des clauses de non concurrence.
Il est nécessaire de résumer le cadrage jurisprudentiel de la
contrepartie financière à la clause de non concurrence :
-elle est une condition de validité de la clause de non
concurrence,
-elle doit être versée après la rupture du contrat,
-elle ne doit pas être dérisoire,
-son montant ne peut dépendre uniquement de la durée d'exécution
du contrat,
-elle est due même en cas de faute grave du salarié,
-elle est due que le contrat soit rompu à l'initiative de
l'employeur ou du salarié.
Enfin, il est important de souligner qu'en l'état actuel de la
jurisprudence aucun élément n'est précisé sur le seuil de la
contrepartie financière à apprécier. Aussi, le principe de
proportionnalité doit être privilégié, et surtout la fixation d'un
minimum dans les conventions collectives.
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