La féminisation de la population active
française est désormais établie et cette tendance devrait se poursuivre
dans les années à venir. Bien qu'elles participent largement à la vie
économique, les femmes subissent toujours des inégalités en matière de
salaire, de responsabilités, de chômage et de précarité. Premier facteur
de discrimination, le temps partiel. Selon une étude de l'OFCE parmi les
4 millions d'actifs à temps partiel, 82 % sont des femmes. Par ailleurs,
elles sont également surreprésentées dans les emplois instables et moins
bien rémunérées, les CDD, les stages d'insertion, etc.
Les inégalités se
renforcent avec le niveau hiérarchique
Ces inégalités tendent à se renforcer en s'élevant dans la
hiérarchie professionnelle. Si le taux de féminisation de l'encadrement
connaît une évolution croissante passant de 24% en 1982 à plus de 37% en
2005, d'importantes disparités demeurent selon les fonctions et les
secteurs d'activité. Alors que leur niveau de qualification et de
compétence s'accroît continuellement, les femmes cadres continuent de
percevoir une rémunération inférieure de 21% à celle de leurs homologues
masculins. Le « plafond de verre », concept né dans les années soixante
dix aux Etats-Unis pour désigner les barrières invisibles et
artificielles, érigées par des préjugés d'ordre comportemental et
organisationnel, qui empêchent les femmes d'accéder aux plus hautes
responsabilités est lui aussi bien réel. Parmi les femmes cadres, 73%
sont cadres administratifs et commerciaux, 27% sont ingénieurs et cadres
techniques. Elles se font en revanche plus rares parmi les cadres
dirigeants. Dans les 126 000 entreprises ou groupes de plus de 10
personnes, le taux de féminisation des postes de PDG est de 9% avec
moins de 12 000 femmes à la tête des entreprises. Si dans les
entreprises de 11 à 20 salariés, les femmes assurent la direction dans
11% des cas, ce taux tombe à 2,9% pour les entreprises de plus de 500
salariés.
Un constat partagé
par tous...mais peu suivi d'effets
Si plus personne ne conteste aujourd'hui la véracité de ces
inégalités, l'inscription du seul principe d'égalité hommes-femmes dans
le droit ne suffit pas à garantir sa transposition concrète.
Il faut dire que les facteurs qui concourent à creuser ces écarts
sont multiples allant du poids des mentalités aux responsabilités des
entreprises en passant par l'impact déterminant de l'orientation
scolaire. Très souvent dès l'enseignement secondaire, les dés sont
jetés. Le choix d'une filière se répercute dans l'enseignement supérieur
au sortir des formations et lors de l'insertion professionnelle. En
2003, 56% des étudiants à l'université sont des femmes et 25% seulement
sont élèves d'école d'ingénieur. A cela s'ajoute le poids des normes
socioculturelles qui dans bien des cas sont lourdes de conséquences
lorsqu'elles conditionnent une moindre attente en terme de carrière
vis-à-vis des filles voire une orientation vers des filières déjà
féminisées.
Au sein des entreprises les modes de managements et de
recrutement sont tout aussi déterminants dans le renforcement des
inégalités. Trop souvent les femmes sont exclues des postes à haute
responsabilité non pas parce que leurs compétences sont moins bonnes
mais tout simplement pour éviter qu'en tant que femmes elle ne viennent
déconstruire les schèmes mentaux des décideurs eux-mêmes. S'ajoute le
poids des stéréotypes tenaces qui tendent à la fois à évincer les femmes
sous prétexte qu'elles privilégieraient leur vie personnelle à leur vie
professionnelle et à les culpabiliser en les qualifiant de « mauvaises
mères » lorsque celles-ci font preuve de réussite et d'audace.
Rendre visibles les
inégalités pour mieux les combattre
De tout évidence les textes législatifs ou réglementaires adoptés
depuis 30 ans n'ont pas permis de corriger ces disparités et
l'attribution récente d'un « label égalité » aux entreprises a de quoi
laisser perplexe. Car sans volontarisme de la part des directions
d'entreprises, la situation a peu de chances d'évoluer.
Pour l'UCI-FO le principe « à travail égal, salaire égal »
demeure intangible et l'action syndicale doit s'efforcer de rendre
visible ces inégalités pour mieux les combattre. Le cadre de la loi dite
"Génisson" du 9 mai 2001 fait de l'égalité professionnelle un axe de
négociation annuelle obligatoire. Elle doit conduire par le biais de la
négociation collective à ce que les entreprises favorisent le
recrutement des femmes, leurs garantissent l'accès aux mêmes formations
que les hommes , révisent leur procédure de gestion de carrière pour
intégrer les contraintes liées notamment à la maternité et aux premières
années de socialisation des enfants, favorisent la « parentalité » dans
le cadre professionnel en facilitant l'articulation vie privée/vie en
entreprise et adaptent au mieux l'organisation du temps de travail tout
en refusant le culte du présentéisme comme seul critère d'efficacité.
Pour l'UCI-FO agir pour l'égalité professionnelle est une
exigence qui nous concerne tous. Elle est au cour de nos priorités
syndicales, plus encore elle est au-delà de la question du genre, un
combat plus large pour restaurer la référence au deuxième principe de la
devise républicaine et faire que celle-ci ne soit plus qu'un simple
effet de langage.
Eric PERES
Secrétaire général-adjoint de l'UCI-FO
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